jeu, 11/13/2014 - 22:38
Les humanitaires, nouvelles proies des groupes armés
Le scenario catastrophe d’un pays à feu et à sang, laissé à l’abandon par des organisations non-gouvernementales (ONG) médicales découragées, prend forme en Centrafrique. Car sur ce territoire, où fleurissent les groupes armés, le droit humanitaire international est de moins en moins respecté.
Dégradation des conditions sociales, problèmes économiques, criminalité et absence de gouvernance ont mené à un véritable foutoir généralisé, dont les humanitaires sont les dernières victimes. Les véhicules des ONG, transportant du matériel médical, sont de plus en plus fréquemment pris pour cible et les employés occidentaux, rançonnés par des groupes armés alcoolisés ou sous l’emprise de drogues, postés sur des barricades (la périphérie de Bangui, l’axe nord-ouest Bangui-Cameroun et l’axe nord Bangui-Tchad étant les zones les plus dangereuses).
L’ONG Médecins sans frontière (MSF) a tiré la sonnette d’alarme, mardi 11 novembre, après avoir été la cible d’attaques, coup sur coup, le 7 et le 8 novembre, entre Yaloké et Bossembélé.
Chez MSF, on pensait que le paroxysme avait été atteint en avril dernier, lorsqu’une attaque dans l’hôpital de Boguila avait fait 16 morts, dont trois employés locaux de MSF. À cette date, le sombre bilan des agressions commises contre l’ONG en Centrafrique (vols de voitures, braquages ou agressions physiques) s’élevait déjà à 115, sur une période de 15 mois.
Mais aujourd’hui, l’organisation humanitaire affirme “toucher les limites en RCA”. Très présente sur la zone, elle a décidé de suspendre ses mouvements terrestres, mais uniquement pendant quelques jours, le but n’étant pas de faire trinquer la population pour des actes considérés comme “crapuleux”, indique-t-on à Bangui.
© Fred Dufour, AFP | Médecin de MSF prodiguant des soins à un blessé en Centrafrique
Avancée à vue
Ces derniers mois, rares sont les ONG, devenues malgré elles les dernières sources de revenus pour les bandits, qui n’ont pas été contraintes de suspendre, à un moment ou à un autre, leurs activités pour cause d’insécurité. En juin, l’ONG italienne Coopi s’y est résolue, après avoir été victime d’une attaque, tout comme la Croix-Rouge centrafricaine en août.
L'organisation Médecins du monde vient, elle, de stopper temporairement ses déplacements vers les sites qu’elle a établis dans la capitale et sa périphérie, à savoir quatre centres de santé, un hôpital et une maternité. La semaine dernière, une autre ONG, qui préfère garder l’anonymat pour des questions de sécurité, s’est fait racketter dans la périphérie nord de Bangui. Depuis, la zone est évitée.
Chaque jour, les consignes changent pour les humanitaires. Les premières heures de la journée sont privilégiées par certains pour les déplacements, quand les hommes armés ne sont pas encore trop ivres. Les convois, considérés comme plus sûrs, sont parfois préférés aux véhicules isolés. D’autres fois, ce sont les véhicules isolés, plus discrets, qui sont préférés aux convois. “On fait de l’ajustement sécuritaire au quotidien”, explique une source humanitaire souhaitant rester anonyme.
Ces solutions à court terme traduisent le flou dans lequel évoluent les organisations et cachent le vrai dilemme auquel elles font face : devenir un moyen de subsistance pour les groupes armés ou délaisser ceux qu’elles sont venues secourir. Cette dernière option n’est même pas envisagée, glissent tous les intéressés interrogés.
“On ne compte pas laisser tomber la population au moment où elle a le plus besoin de nous, ni la prendre en otage”, explique Thierry Dumont, chef de mission MSF.
Les stratégies infructueuses des ONG
Cependant, pour échapper au racket et à la violence des groupes armés, devenus imprévisibles car destructurés, les ONG disposent de bien peu de parades.
Certaines tentent de se protéger en annonçant ne jamais payer de rançons, bien que, dans les faits, des arrangements soient possibles. En outre, plusieurs d’entre elles assurent refuser toute escorte militaire, afin de ne pas prendre part au conflit et ainsi ne pas devenir des cibles - ce qu’elles sont déjà.
Restent les stratégies de communication qui, elles, diffèrent largement. Quand Médecins du monde et autres optent pour la discrétion, afin de protéger les équipes, MSF communique largement sur les problèmes qu’elle rencontre, dans le but de provoquer une prise de conscience.
“Nous espérons qu’il y aura une réaction de la part de la Minusca, de Sangaris, d’EUFOR-RCA (opération militaire européenne) et du gouvernement, car, jusqu’à présent, ils ne font pas leur travail”, explique Thierry Dumont. Basé à Bangui depuis mars, ce dernier n'est pas prêt d’en partir.
Dégradation des conditions sociales, problèmes économiques, criminalité et absence de gouvernance ont mené à un véritable foutoir généralisé, dont les humanitaires sont les dernières victimes. Les véhicules des ONG, transportant du matériel médical, sont de plus en plus fréquemment pris pour cible et les employés occidentaux, rançonnés par des groupes armés alcoolisés ou sous l’emprise de drogues, postés sur des barricades (la périphérie de Bangui, l’axe nord-ouest Bangui-Cameroun et l’axe nord Bangui-Tchad étant les zones les plus dangereuses).
L’ONG Médecins sans frontière (MSF) a tiré la sonnette d’alarme, mardi 11 novembre, après avoir été la cible d’attaques, coup sur coup, le 7 et le 8 novembre, entre Yaloké et Bossembélé.
Chez MSF, on pensait que le paroxysme avait été atteint en avril dernier, lorsqu’une attaque dans l’hôpital de Boguila avait fait 16 morts, dont trois employés locaux de MSF. À cette date, le sombre bilan des agressions commises contre l’ONG en Centrafrique (vols de voitures, braquages ou agressions physiques) s’élevait déjà à 115, sur une période de 15 mois.
Mais aujourd’hui, l’organisation humanitaire affirme “toucher les limites en RCA”. Très présente sur la zone, elle a décidé de suspendre ses mouvements terrestres, mais uniquement pendant quelques jours, le but n’étant pas de faire trinquer la population pour des actes considérés comme “crapuleux”, indique-t-on à Bangui.
© Fred Dufour, AFP | Médecin de MSF prodiguant des soins à un blessé en Centrafrique
Avancée à vue
Ces derniers mois, rares sont les ONG, devenues malgré elles les dernières sources de revenus pour les bandits, qui n’ont pas été contraintes de suspendre, à un moment ou à un autre, leurs activités pour cause d’insécurité. En juin, l’ONG italienne Coopi s’y est résolue, après avoir été victime d’une attaque, tout comme la Croix-Rouge centrafricaine en août.
L'organisation Médecins du monde vient, elle, de stopper temporairement ses déplacements vers les sites qu’elle a établis dans la capitale et sa périphérie, à savoir quatre centres de santé, un hôpital et une maternité. La semaine dernière, une autre ONG, qui préfère garder l’anonymat pour des questions de sécurité, s’est fait racketter dans la périphérie nord de Bangui. Depuis, la zone est évitée.
Chaque jour, les consignes changent pour les humanitaires. Les premières heures de la journée sont privilégiées par certains pour les déplacements, quand les hommes armés ne sont pas encore trop ivres. Les convois, considérés comme plus sûrs, sont parfois préférés aux véhicules isolés. D’autres fois, ce sont les véhicules isolés, plus discrets, qui sont préférés aux convois. “On fait de l’ajustement sécuritaire au quotidien”, explique une source humanitaire souhaitant rester anonyme.
Ces solutions à court terme traduisent le flou dans lequel évoluent les organisations et cachent le vrai dilemme auquel elles font face : devenir un moyen de subsistance pour les groupes armés ou délaisser ceux qu’elles sont venues secourir. Cette dernière option n’est même pas envisagée, glissent tous les intéressés interrogés.
“On ne compte pas laisser tomber la population au moment où elle a le plus besoin de nous, ni la prendre en otage”, explique Thierry Dumont, chef de mission MSF.
Les stratégies infructueuses des ONG
Cependant, pour échapper au racket et à la violence des groupes armés, devenus imprévisibles car destructurés, les ONG disposent de bien peu de parades.
Certaines tentent de se protéger en annonçant ne jamais payer de rançons, bien que, dans les faits, des arrangements soient possibles. En outre, plusieurs d’entre elles assurent refuser toute escorte militaire, afin de ne pas prendre part au conflit et ainsi ne pas devenir des cibles - ce qu’elles sont déjà.
Restent les stratégies de communication qui, elles, diffèrent largement. Quand Médecins du monde et autres optent pour la discrétion, afin de protéger les équipes, MSF communique largement sur les problèmes qu’elle rencontre, dans le but de provoquer une prise de conscience.
“Nous espérons qu’il y aura une réaction de la part de la Minusca, de Sangaris, d’EUFOR-RCA (opération militaire européenne) et du gouvernement, car, jusqu’à présent, ils ne font pas leur travail”, explique Thierry Dumont. Basé à Bangui depuis mars, ce dernier n'est pas prêt d’en partir.
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